Tout semble sourire actuellement au groupe d’électronique présidé par Patrice Caine. Et l’avenir apparait très prometteur.
En dépit d’une baisse des prises de commandes de 9% en 2017, Thales va bien. Très bien même. Le groupe d’électronique grimpe à des altitudes de rentabilité jamais atteintes (9,8% de marge). Et pourtant ce n’est pas encore fini. Son jeune PDG Patrice Caine, qui a su convaincre l’an dernier Gemalto de rejoindre sa galaxie malgré l’intérêt insistant du hussard Atos, veut envoyer son groupe sur des orbites encore plus élevées. Il vise en 2018 une croissance de l’Ebit entre 1,62 et 1,66 milliard (contre 1,54 milliard en 2017), des prises de commandes à hauteur à 15,5 milliards d’euros (14,9 milliards en 2017) et du chiffre d’affaires (entre 4% et 5%). Résultat, Thales a séduit les marchés et a donc cartonné mardi soir à la clôture de la bourse de Paris (+6,26% à 95,34 euros).
“2017 a été une nouvelle année record pour Thales (qui) a dépassé tous ses objectifs financiers annuels”, s’est félicité mardi Patrice Caine.
Le groupe semble d’ailleurs bien armé pour satisfaire les ambitions de son PDG. Les marchés où Thales est présent, surfent actuellement sur des courants très ascendants (défense, aéronautique, cybersécurité, transport) à l’exception de quelques rares marchés comme celui des satellites de télécoms complètement atone. Patrice Caine peut donc avoir “la banane”, tout lui a souri jusqu’à présent. Même l’activité transport en souffrance à son arrivée recommence à gagner de l’argent (72 millions d’Ebit) et Naval Group confirme son redressement (35% détenus par Thales). Cela devrait lui sourire encore quelque temps.
Faut-il être inquiet sur les prises de commandes en baisse?
Pour la deuxième année consécutive, les prises de commande ont baissé après avoir, il est vrai, atteint des sommets (18,8 milliards en 2015 et 16,5 milliards en 2016). Deux années marquées par les premières commandes de Rafale (Égypte et Qatar en 2015, puis Inde en 2016). 2017 a été une année blanche dans le carnet de commande du Team Rafale même si le Qatar a bien commandé douze Rafale supplémentaires en décembre… mais n’a pas encore versé le fameux acompte. Résultat, Thales enregistre un book-to-bill (ratio chiffre d’affaires sur prises de commandes) négatif depuis cinq ans (0,94, contre 1,11 en 2016 et 1,34 en 2015).
En prime, Thales n’a obtenu l’an dernier aucun très grand contrat supérieur à 500 millions d’euros contrairement aux deux années précédentes. Le groupe a toutefois engrangé 19 grandes commandes d’un montant supérieur à 100 millions (2,91 milliards d’euros au total). Conséquence : le carnet de commande s’effrite un petit peu à 31,9 milliards (contre 33,5 milliards en 2016). D’ores et déjà, Thales devrait récupérer en 2018, sauf accident, au moins un contrat Rafale (Qatar, voire l’Égypte). En février, il a déjà engrangé le très grand contrat de gestion du trafic aérien OneSKY en Australie (777 millions d’euros). Le groupe vise de façon conservatrice 15,5 milliards d’euros.
Il existe de nombreuses raisons de rester optimiste pour Thales. Les pays émergents vont évidemment poursuivre leurs investissements dans les grandes infrastructures même si les prises de commandes de Thales dans cette catégorie de pays se sont effondrées en 2017 (- 36%). Tirées par la France (+28%) et le Royaume-Uni (+15%) en 2017, elles se sont en revanche bien portées sur les marchés matures (+7% contre 3,9% en 2016). Ce qui est nouveau pour cette catégorie de pays d’obtenir une telle accélération de la croissance.
Plus précisément, dans la défense, le réarmement mondial bénéficie à Thales à l’image de la France qui fait un effort dans le cadre de la loi de programmation militaire (295 milliards entre 2019 et 2025) dans le domaine du renseignement, de l’anticipation,de la cybersécurité et de l’intelligence. Des segments de marché où est très présent Thales. D’ailleurs, le ministère des Armées vient de confier à Dassault Aviation l’intégration sur trois Falcon de la Capacité Universelle de Guerre Electronique (CUGE) développée par Thales (programme Epicure). Patrice Caine constate également une poursuite des investissements importants dans la défense des pays du Golfe, encouragés par la remontée des cours du pétrole, et d’Asie du Sud-Est.
Thales continue également de miser sur l’espace, un marché où il y a “énormément d’avenir”, estime Patrice Caine. Notamment en vue de réduire la fracture numérique, d’accompagner la croissance dans l’observation civile et les besoins en matière de surveillance de l’espace et de la maintenance en orbite. Le groupe devrait également profiter de l’émergence de nouveaux “business models” avec la multiplication des applications spatiales (agriculture, pétrole et gaz…). Par ailleurs, les commandes d’avionique et de multimédia à bord (IFE) dans l’aéronautique restent dynamiques en raison de la hausse des cadences de production des avionneurs (Airbus et Boeing notamment). Enfin, dans le domaine du transport, les pays émergents continuent de vouloir investir dans les infrastructures (signalisation urbaine et pour les grandes lignes) et les pays matures dans les trains autonomes.
Thales accroît ses investissements dans la R&D
Le groupe a également augmenté de 9% ses dépenses de recherche et développement (R&D) en 2017. Thales a investi l’an dernier sur fonds propres 797 millions d’euros (contre 731 millions d’euros en 2016). Et la R&D devrait représenter 5,5% du chiffre d’affaires du groupe en 2018 (contre 5,2% en 2017). Soit une hausse d’environ 10% pour 2018. Au total, la croissance des dépenses de R&D est supérieure à 40% sur six ans. La croissance de la R&D est plus rapide que celle du chiffre d’affaires pour la deuxième année consécutive. Ces dépenses “ne se font pas au détriment de la profitabilité” du groupe, rappelle Patrice Caine.
“La R&D, c’est vraiment le nerf de la guerre pour Thales, une entreprise technologique comme la nôtre base son futur sur sa capacité à investir toujours plus, souligne-t-il. Ces investissements permettent de jouer dans la cour des grands, dans la ligue des champions”. Car pour Thales, l’innovation et la R&D sont deux éléments de différenciation clés sur les cinq grands marchés du groupe. Au global, le groupe investit en moyenne entre 2,5 et 3 milliards par an dans la R&D, les clients payant la facture de la R&D dans le cadre du développement de leur programme.
Gemalto, une nouvelle pépite dans la galaxie de Thales
Thales, qui a annoncé l’acquisition fin 2017 du spécialiste français de la sécurité numérique Gemalto, estime que la “préparation de cette offre se déroule comme prévu”. “L’opération devrait être réalisée peu de temps après l’obtention de toutes les autorisations règlementaires usuelles, ce qui est envisagé pour le second semestre 2018″, précise Patrice Caine. Surtout ,”ce projet consolidera notre position de leader de la transformation digitale de nos métiers et de nos clients, et nous permettra de construire un leader mondial du marché de la sécurité digitale”, estime le PDG de Thales.
Le rachat de Gemalto par Thales vise à créer un leader mondial dans le traitement et la protection des données, avec une offre complète de sécurisation de l’internet des objets (IoT), et à ouvrir de nouveaux marchés pour le groupe d’électronique, comme la voiture connectée. “Nous sommes en train de rapprocher deux des plus grandes sociétés de technologies en Europe”, avait expliqué en décembre Patrice Caine. “Dans le domaine de la connectivité, de l’IOT, et de la cybersécurité, la combinaison de Thales et Gemalto est tout à fait spectaculaire”, avait-il précisé. Et source de profits futurs…
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